La réflexion sur le temps est
consubstantielle à la philosophie et pourtant, il n’existe pas de concept
philosophique du temps. Car le temps ne se capture pas, le temps ne se maîtrise
pas. Il a donc était nécessaire pour l’homme, très tôt, de « dire le
temps » de le mesurer avec un outil (clepsydre, sablier etc…)par peur de
le laisser passer. Et à partir du XIIIè siècle, naît l’idée de signaler le
temps par un mécanisme qui fait du bruit !
Avant le temps, qu’y avait-il ? Après
le temps, qu’y aura-t-il ? Y-a-t-il un sens du temps ? Qu’est-ce qui
se joue le temps du passage du temps ? Ce qui est sûr, c’est que nous
avons une expérience commune du temps mais la temporalité dépend du contexte de
civilisation. Alors nous avons eu besoin de mettre le temps « en
image » pour lui donner de la consistance !
De l’Antiquité aux XVIè/XVIIè siècles, le
monde est un système clos, fini, limité : c’est le Kosmosgrec. Le temps est perçu comme cyclique (jour/nuit et saisons/années).
C’est le mythe de l’éternel retour : le temps est « une image mobile de
l’éternité immobile », il a une valeur négative (cf Héraclite et Platon). Dans la pensée
hébraïque, le monde est certes fini, mais il est traversé par une histoire où
se joue le salut de l’homme ; là, il y a prise de conscience historique de
l’homme et le temps devient une dimension essentielle de sa réalisation. La
pensée chrétienne est héritière de cette pensée (dogme de l’Incarnation). Dans
ses « Confessions », SaintAugustin définit le temps. Des trois temps, le passé, le présent et le
futur, seul le présent existe ; il y a trois présents : le présent du
passé, le présent du présent et le présent du futur. Ces trois temps sont dans
notre esprit et de fait, la temporalité est liée à l’être humain même. Il n’y a
du temps que pour nous : « le temps est une extension de
l’esprit ». L’être humain se déploie temporellement, l’homme est le temps.
Le temps a ici, une valeur positive.
Depuis Copernic, l’homme ne cesse de
vouloir la maîtrise et la métrise du temps (cf Michel Serres. Les
sciences de la nature ont bien à faire au temps mais au temps scientifique,
abstrait, homogène. D’une manière générale, les sciences se sont sauvées du
temps en le spécialisant, en en donnant une représentation géométrique, mathématique.
Parce qu’in fine, le temps fait peur ! Et c’est la raison essentielle qui
fait que nous essayons depuis la nuit des temps, de le définir, de le
maîtriser! Ce qui constitue notre conscience du temps, c’est la durée. Cette
approche se confirme avec Ilya Prigogine, dans
les années 80. Il fait un renouvellement complet de la phénoménologie du temps.
Les sciences contemporaines intègrent la dimension de la temporalité ;
elles s’ouvrent à l’imprévu, à l’événement. L’homme est bien un élément de la
nature pris dans une histoire.
Le temps est pluriel. Il est une pluralité
de temps avec chacun leur temps. Il est impossible de les unifier. Le temps est
un millefeuille (cf FernandBraudel). Une chose est certaine : le temps, c’est le devenir
individuellement et collectivement. Il est une espérance collective. L’homme
s’ouvre sur l’avenir qu’il projette pour lui et pour les autres. Le temps est
le vecteur de la réalisation de l’homme.
Sylvie
Lacoste